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"Hier, j'ai défilé ..."

Hier, j’ai défilé …

Bravant les nouveaux interdits parlementaires, le froid cinglant, les idéaux de citoyens iridescents, j’allais défiler à côté d’un syndicat …

Peut-être serions-nous plus nombreux à nous exprimer ?... 
Lorsque je gare le minibus en haut du foirail, mon cœur palpite. Le blouson, la casquette, les clops, l’envie, l’espoir, c’est bon tout le monde est là, je peux y aller …


Fébrilement, je jette un regard par-dessus le mur et je suis saisi par la vision de ce panorama … Il y a du monde … Et puis la déception me prend la gorge à l’analyse du cortège : un énorme tracteur rouge et rutilant, des minibus en provenance de La Rochelle, de Caen, de Brive, de Toulouse… Non, ces gens ne sont pas là pour soutenir la colère populaire … Je m’en veux … Comme trop souvent, aveuglé par mon envie de fédérer, j’ai oublié qu’il y avait le congrès de la fédération nationale bovine et que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation était là … 


Au fond du parking, devant l’arrêt de bus, mon regard les trouve, ils sont là et c’est beau … 


Une bonne centaine de personnes, arborant leur couleur, du rouge, du blanc, une pointe de vert et de noir et du jaune vif, un arc en ciel dans l’obscurité de cette journée qui restera dans l’histoire comme celle du triomphe de l’obscurantisme… Merci … Vous me faites du bien …
En effet, ce matin, nos représentants ont voté pour une mise sous scellé de l’expression de nos sentiments…

Il n’y a pas eu de photo-finish : 387 votes « pour », 92 « contre », 74 « abstentions » …
Rien a changé depuis un siècle, la majorité suit aveuglement, 92 députés essaient de résister, 74 ne veulent pas se fâcher … Soixante quatorze couards dont mon député … Lui qui avez accueilli les gilets jaunes d’un ton paternaliste, lui qui sait qu’ici les jaunards ont toujours étaient pacifiques et n’ont rien cassé … Quelle misère, il veut que l’état les fasses taire car « qui ne dit mots consent » … Le calcul et la lâcheté morale en guise de représentation … Voilà encore un symbole source de la colère populaire … Le dictât du carriériste politique sur l’idéal commun … Je ne vous remercie pas Mr le député Pierre Morel A L'Huissier…


J’entre dans le cortège, je plaisante, je prends le pouls, je fais la bise, je serre des pognes … J’hésite, je souris, je n’ose pas aller parler à la prof de Français de mon aînée qui m’intimide toujours, je caresse un chien, je sympathise avec un couple de Nantais, une femme en fin de carrière … Je crée du lien et du liant mais à quoi bon … Je donne mon point de vue, y vais de mes citations éculées … Je me sent vivant … Moins esseulé et pourtant … Nous marchons, certains crient leur refus de la société qu’ils nous construisent là-haut, tout en haut de la pyramide du pouvoir … Je ne comprends toujours pas… Le gouvernement veut faire taire les opinions différentes et on est qu'une centaine à défiler … 
Ou sont donc mes amis ? Ces amis avec qui j’ai tant partagé, avec qui j’ai refais 100 fois le monde dans des délires parfois alcoolisés mais toujours sincères …

J’ai envie de crier … Mais à qui ? … Ils sont si apeurés qu’ils ne sortiront pas pour se sauver de l’incendie. Ils vont rester là, a attendre la prochaine élection qui ne leur permettra rien, le média s’occupe d’entrer dans leur terrier pour dicter la conduite et pour démontrer combien sont raisonnables les actions gouvernementales … Je suis seul, je m’isole, je veux fuir. Et puis il y a toi, Guillaume, représentant de la CGT qui est là et qui annonce une convergence des luttes, la FSU aussi… Mais combien sont-ils à vouloir encore se battre ?


Si les Gilets Jaunes ont peur d’être récupéré, ou étaient ils lorsque le code du travail et les retraites étaient attaqués ? Les syndicats portent eux-aussi, et exactement de la même façon, la colère de ne pas avoir été soutenus par la force populaire en ces temps là …
Nous avons fini notre tour de piste avec une halte devant la préfecture et devant le congrès des agriculteurs … Ça y est, c’est fini … Je cache ma déception… Je veux partir, fuir, oublier un instant …
Je dois rentrer à la maison, retrouver les enfants et la femme merveilleuse qui accepte de soutenir mon combat, mais quoi leur dire ?
Sans doute sentant ma fragilité, François, Christophe: « Viens ! On va boire un coup !!! ». Je les accompagne … Je renais de leur humanité … Mon esprit reprend le fil de l’histoire ... J’existe à nouveau … Je délivre mon message et l’écris à présent :
« Ne l’oublions pas, ce mouvement citoyen c’est l’humain avant tout !!!
Syndicalistes, membres associatifs, chômeurs, politiques, journalistes, retraités ne sont que des étiquettes, nous sommes, d’abord et avant tout, des humains…Le citoyen doit renouer avec son humanité et participer au changement de société, sans heurts et sans violences, pour cesser de subir… »
La nuit est tombée, mon espoir resurgit, je m’en vais guilleret …

Merci à la CGT…Merci FSU... Merci les Nantais... Merci les Gilets … 
Merci …

​

F.MESSY
06/02/2019

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